Une oasis urbaine insuffle un peu d’oxygène à l’une des mégapoles les plus saturées du monde.

« Laissez-moi un peu regarder du côté de la plus haute Asie, vers le profond Orient ! J’ai là mon immense poème. »
Jules Michelet

« L’exotisme de Bangkok, c’est du passé ! », déplorent les privilégiés qui l’ont découverte il y a plus d’un demi-siècle. Et d’évoquer les anciens marchés flottants et autres demeures de charme colonial, aujourd’hui sacrifiés au bétonnage tous azimuts.
Pourtant, en cherchant bien, on déniche encore des reliques de l’ancien Siam ; les temples, bien sûr, à profusion. Pour les canaux, il faut repérer celui qui débouche sur le fleuve Chao Phraya – colonne vertébrale de la ville – bordé de cabanons prisés de quelques routards et artistes marginaux. Le « pittoresque » peut aussi jaillir, cyniquement, de la précarité voisine.
Les nostalgiques de l’ancienne « Cité des anges » se rabattent sur ce qui fut la propriété du négociant Jim Thomson, mémoire préservée d’une esthétique révolue.

Vertiges
Rien de plus tendance que de viser un roof top (sommet) de palace, soleil couchant. On domine alors un hérisson de gratte-ciel façon Manhattan, émergeant d’un smog rougeâtre. Un verre à la main, on arrose Instagram de silhouettes aussi audacieuses que celle du King Power Mahanakhon, à la verticalité pixelisée. Ce plus haut totem est désormais emblématique d’une Gotham City globalisée, dont on contemple de haut le fatal engorgement.

Verdure
Bang Kachao a été nommée « meilleure oasis urbaine » par Time Magazine. Pourtant facilement accessible – par une barge – cette presqu’île de 16 km2 reste peu connue des touristes, encore moins depuis la pandémie. Mais pour quiconque souhaite s’offrir un bol d’air frais, le lieu est idéal, contrebalançant l’effervescence permanente de la capitale. Ce petit territoire est couvert de milliers de palétuviers, cocotiers, bambous et autres végétaux. De nombreux panneaux explicatifs, rédigés en thaï et en anglais, permettent d’identifier les différentes essences végétales.

Exploration
Jusqu’à récemment, la bicyclette constituait le meilleur moyen de visiter cet éden ; on vient d’y ajouter la trottinette électrique – en location à l’entrée – pour rejoindre une fine piste surélevée qui s’enfonce dans la nature. En quelques minutes, on se retrouve dans une jungle peuplée d’oiseaux, varans et tortues.

Agapes
Surprise de se retrouver au milieu de cette forêt, face à un ring de boxe thaï. Un ex-champion de ce sport national y entraîne de futurs espoirs. Après avoir décroché une noix de coco pour l’apéritif, le propriétaire des lieux conseille de poursuivre jusqu’au marché flottant de Bang Namphueng, où chaque weekend la communauté thaï-môn régale les visiteurs de hoi thot (pancakes aux moules frites) ou de khanom khrok, sortes de puddings à la noix de coco cuits dans les trous d’un appareil en fonte.
On se sent alors requinqué pour retrouver les embouteillages endémiques de cette autre ville-qui-ne-dort-jamais.

Photos: pichonvoyageur.ch www.tourismthailand.ch
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