D’Hiroshima à Auschwitz, de Ground Zero à Tchernobyl, ces sites attirent les curieux.

« Mon affinité avec la mort a commencé dès mon plus jeune âge non pas par excès de morbidité mais par conscience de la finitude et plus exactement de Ma finitude ».
Nina Bouraoui (Poing mort)

Mémorial d'Hiroshima, Japon
Mémorial d’Hiroshima, Japon

La curiosité populaire pour des endroits chargés de souffrance n’est pas nouvelle. Avant même que ne surgisse la notion de tourisme, champs de bataille, sites de catastrophes et scènes de meurtre attiraient déjà les curieux.

Le sarcophage entourant la « bête » encore vivante en Ukraine

Noir c’est noir

L’Afrique elle-même surfe sur cette vague morbide. Au Rwanda, les touristes photographient à Kigali les monuments dédiés au génocide de 1994.
Au Togo, le marché Voodoo d’Akodessawa expose des crânes, des têtes de singes et autres cadavres d’animaux entassés dans le puanteur. On y consulte les guérisseurs traditionnels et les sorciers, détenteurs de remèdes à tous les maux : crânes de chat contre la perte de mémoire, os de chauve-souris pour soigner la rage, hibou pour conjurer le mauvais sort.

Au marché d’Akodessawa


En Amérique Latine, l’ex-tueur à gage de Pablo Escobar a mis à profit son passé d’assassin pour réaliser des visites autour de la personnalité et de la vie du baron colombien de la drogue. A Sarajevo, un hôtel propose de dormir dans un bunker bercé par le son des tirs de mortier.

Produits dérivés

Bien sûr, plutôt que de laisser les nouvelles générations dans l’ignorance, le tourisme macabre présente un aspect éducatif, cathartique. Il peut contribuer à un nécessaire travail de mémoire.
Il y a une décennie, un seuil hautement symbolique a été franchi à Auschwitz-Birkenau. Evalué à 1,2 million, le nombre de visiteurs a dépassé en une année celui des victimes du camp d’extermination entre 1940 et 1945, confirmant l’intérêt pour l’holocauste, alors même que les témoins disparaissent et que les faits s’éloignent.

Certains visiteurs moins informés – voire pas informés du tout – font la queue devant des fours crématoires, ignorant pourquoi ils se trouvent là et comment s’y comporter. Il est désormais légitime de parler de fréquentation touristique, d’autant que les opérateurs de Cracovie ou de Varsovie ont opportunément saisi l’intérêt d’organiser des « Auschwitz Tours ».
Comment justifier la vente de souvenirs et pacotilles sur les lieux commémoratifs ?

« Ground Zero », à New York, à l’emplacement du World Trade Center