Cette icône de la mondialisation fascine ou irrite. Est-elle l’expression d’un véritable projet ou d’une utopie sans lendemain ? …une ville sans racines, sans identité propre ?

« Juste après le 11 septembre, il semblait que l’idée d’un énorme gratte-ciel pourrait être considérée comme obsolète. Il est revenu, mais je pense que c’est plus étroitement liée à la montée des villes asiatiques et du Moyen-Orient de l’économie mondiale (Dubaï, Shanghai, Taipei, etc.) que toute autre chose . »
Paul Goldberger

Dubaï et Emirates Airways lorgnent vers l’avenir

Effervescence

L’Emirat se projette en permanence sur l’avenir comme s’il ne restait plus qu’à bâtir le futur après l’avoir imaginé et dessiné, “quoi qu’il en coûte”. Laisser passer ne fût-ce que deux ou trois ans avant de revenir à Dubaï expose le voyageur à de nouveaux étonnements : sur une ancienne dune, des gratte-ciel flambants neufs; en bordure de mer, l’inauguration d’un complexe extravagant ou l’ouverture d’une attraction aussi délurée que la piste de neige sous cloche.

Des chantiers à n’en plus finir
Une vue époustouflante sur la terrasse de l’Hôtel W

Tourbillon

L’héritage architectural de cette mégapole se résume en quelques reliques d’ancien souk, auquel des pastiches contemporains font référence. New York – longtemps considérée comme paradigme de modernité – peut bien revendiquer des constructions “vintage”, alors que Dubaï n’a “que” du neuf à offrir… jusqu’à ce que le temps vienne patiner ses rutilants totems.

Entraînés en quelques décennies seulement par un tempo d’enfer, pêcheurs de perles et bédouins ont ainsi passé – sans transition – de la tente rustique au building de verre et d’acier, de la natte rêche au marbre poli.

Nostalgies

L’esprit du désert tente de s’accrocher à cet étourdissant maelström. Alors que la voilure du célèbre Burj Al Arab avait donné le ton, le récent Hôtel W illustre ce courant jusqu’à l’obsession. Ce palace high-tech entend symboliser tous les éléments emblématiques de la culture séculaire locale : au sol, la mosaïque reproduit une peau de crotale. Au mur, les éléments décoratifs célèbrent différents contes des mille et une nuits, les motifs traditionnels du tapis volant s’éparpillent jusqu’au plafond…

A l’Hôtel W
Stéphanie Reichenbach et ses créations dans le désert

Glamping

Surfant sur cette vague, Stéphanie Reichenbach a fondé Sonara, une entreprise qui revendique l’invention du Nesting, un concept futuriste de vie – luxueuse – dans la nature.
“Je pense qu’on peut dormir dans le desert sans compromis sur le confort. Nous proposons des spectacles et activités traditionnelles avec un twist plus moderne et contemporain, à courte distance du bruit et des lumières de la ville. Lorsque j’ai créé Nara, j’ai toujours voulu que mes camps soient écologiquement responsables, pas pour des raisons marketing mais pour respecter le désert et l’environnement dans lequel on se trouve. Pour rappel, nous sommes basés dans une réserve naturelle (DDCR, Dubai Desert Conservation Reserve), où la faune et la flore sont très variés, et nous devons les respecter. Je pense que c’est une évidence et une responsabilité que chacun doit accomplir dans la mesure du possible. »

La réalisation de l’architecte Shaun Killa

Science-fiction

Exemple extrême du paradoxe dubaïote: l’ouverture, en 2022, d’un musée du futur. L’automobiliste qui gagne le centre-ville au départ de l’aéroport a de quoi être interpellé par cette incroyable coquille décorée d’éléments de la calligraphie arabe.

Si certains s’émerveillent de son défi architectural, d’autres la jugent kitch et surtout vide de contenu. L’Emirat aurait-il quelque peine à cerner les contours de ce qui l’attend – et nous avec – dans les domaines des sciences, technologies et vie quotidienne ?

Séjourner à l’Hôtel W

Photos: DR et pichonvoyageur.ch